dimanche 20 mars 2016

POUR PLUS DE NEUTRALITE DE LA TVA


Anis WAHABI

Le système de la taxe sur la valeur ajouté (TVA) est ingénieux. Il permet de renflouer le budget de l’Etat par des perceptions importantes indirectement à travers la consommation. Ce système est jugé efficace et présente des avantages en termes d'équité et de simplicité, tout en assurant l'État d'un bon rendement.
Contrairement à ce que son nom indique, la TVA n’est pas une taxe, elle n’est pas perçue au titre d’un service rendu par l’ETAT. La TVA est plutôt un impôt indirect sur la consommation. C'est un impôt récent, inventé en France à l'instigation de Maurice Lauré, alors haut fonctionnaire à la direction générale des Impôts, pour remplacer les impôts sur la consommation (taxe sur le prix de vente payé par les consommateurs et taxe sur le chiffre d'affaires des entreprises) et éliminer leurs inconvénients.
Cette Invention française instituée en 1954, a été ensuite adoptée dans de nombreux pays. La Tunisie l’a adaptée depuis 1988, par la loi 88-61 du 2 juin pour remplacer d’autres impôts sur la consommation. Il s’agissait, pour l’histoire de la taxe à la production, la taxe de la consommation et la taxe sur les prestations de services.
La TVA est conçue pour ne toucher que le consommateur final et non chaque entreprise en tant que consommateur intermédiaire. Le principe central de la TVA est d'éviter les impositions cumulatives dites "en cascade" qui conduisent à intégrer dans l'assiette de l'impôt à chaque stade de la commercialisation d'un bien ou d'un service la valeur des taxes cumulatives récoltées au stade précédent. L'assiette est toujours la valeur ajoutée et ne contient aucune part de taxe sur les ventes, contrairement à la plupart des systèmes de taxes sur le chiffre d'affaire.
La personne physique ou morale assujettie à la TVA majore son prix de vente hors-taxe du montant de la taxe sur la valeur ajoutée. Les contribuables ne versent à l'État que la différence entre la TVA qu'elles perçoivent lors de leurs ventes et celle qu'elles ont elles-mêmes versé lors de leurs achats. Ainsi, on ne taxe que la « valeur ajoutée » (définie comme la différence entre le produit des ventes et les coûts des consommations intermédiaires facturées). Les assujettis enregistrent leur prix comptablement hors-taxe, ce qui signifie qu'ils jouent, auprès de leur clients, le rôle de collecteur d'impôt pour le compte de l'État, sans que cette charge ne les touche personnellement. On décrit ce mécanisme comme la « neutralité économique » de la TVA.
Afin d’assurer cette neutralité, le mécanisme de déduction, de collecte et de paiement de la TVA doit être claire et efficace. D’où l’importance de la notion de fait générateur qui régit le moment à partir duquel la TVA devient exigible au trésor public.
En Tunisie, le fait générateur de la TVA est régi par l’article 5 du Code de la TVA qui dispose que :
Le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée est constitué :
1.                Pour les importations, par le dédouanement de la marchandise ;
2.                Pour les ventes, par la livraison de la marchandise. Toutefois, pour les ventes des biens immobiliers visés à l'article premier -II- 7  ainsi que pour les échanges, le fait générateur est constitué par l'acte qui constate l'opération ou à défaut par le transfert de propriété ;
3.                Pour les prestations de services, par la réalisation du service ou par l'encaissement du prix ou des acomptes lorsqu'il intervient antérieurement à la réalisation du service ;
4.                Pour les biens que les redevables se livrent à eux-mêmes, par la première utilisation des biens ;
5.                Pour les travaux immobiliers, par l'exécution partielle ou totale de ces travaux.
Toutefois :
a) La constatation du fait générateur ne peut être postérieure à la facturation totale. L'établissement des décomptes provisoires, de mémoires ou factures partiels rend exigible la taxe sur la valeur ajoutée ;
b) Les entreprises de travaux publics et de bâtiment effectuant des travaux pour le compte de l'Etat, des collectivités publiques locales, des établissements publics à caractère administratif, acquittent la taxe sur la valeur ajoutée sur leurs encaissement afférents aux dits travaux. Dans ce cas, le fait générateur tel que prévu au § 3 ci-dessus détermine le taux de taxe applicable.
Contrairement à ce qui est appliqué en France, le principe de neutralité de la TVA se trouve heurté par certaines de ces dispositions.
En effet, selon les principes généraux du système de la TVA, une entreprise devient redevable de l’impôt au trésor public au moment du transfert de propriété ou de la livraison. Et pour éviter certaines manœuvres visant à retarder le paiement de l’impôt,  on admet aussi l’exigibilité de la TVA sur les encaissements d’avances et d’acomptes.
Pour ce qui est des prestations de service, alors qu’en France la TVA peut être due à l’encaissement, en Tunisie elle est exigible à la réalisation du service ou à la facturation, même si le paiement se trouve sensiblement retardé.
La neutralité est dans ce cas doublement touchée : par le fait d’avancer la TVA au trésor et surtout en cas d’impayé. Dans ce dernier cas, la TVA n’est jamais restituable et est supporté par celui qui l’a facturée.
Afin de pallier à cette insuffisance, il serait intéressant de suivre l’inventeur de cet impôt en liant l’exigibilité de la TVA à l’encaissement.